Comment observer des paramètres physiques (température...) : le capteur électronique
Rechercher ou identifier un capteur que l’on ne connaît pas se fait en observant des produits, en rencontrant des distributeurs de composants ou en recherchant des solutions via les bases de données fabricant ou encore les bases de données accessibles en ligne. Nous citerons les exemples des distributeurs Mouser.fr, DigiKey.fr, Farnell.fr, Radiospares.fr …
Les critères de choix peuvent être, selon une liste non exhaustive :
le respect du cahier des charges, en termes de précision, sensibilité de la mesure, min et max ;
la consommation électrique du capteur, en combinant le courant consommé et la (ou les) tension(s) de polarisation, dont la valeur est appelée force électromotrice (fem) s’il nécessite une énergie externe ;
l’encombrement et les contraintes mécaniques, taille et caractéristiques du boîtier (le package) où deux grandes familles existent :

Les broches de connexion « traversent » tous les plans de routage du circuit imprimé (le PCB).

Les broches restent sur le dessus (top) ou le dessous (bottom) de la carte.
On veillera à identifier :

pour lesquels les connexions ne sont plus en périphérie du boîtier mais sous le boîtier, imposant un routage adapté et n'étant pas faciles à assembler avec un fer à souder ;

qui ont une zone à souder sous leur package, appelée POWERPAD, car elle est bien souvent connectée au GND et impose sa connexion au moment du routage.
la disponibilité : en effet, un composant acheté en quantité, même pour une pré-industrialisation, peut souvent nécessiter 10 semaines de délai d’approvisionnement ;
la tolérance aux variations de l’environnement : bien souvent c’est la plage de température qui garantit le fonctionnement ;
le prix, qui impose de savoir définir son MOQ (Minimum Order Quantity) par lot de production.
Comment le capteur fait-il pour réaliser la mesure ?
Un premier niveau de réponse est qu’on peut difficilement transformer directement un phénomène non électrique en signal électrique. La grandeur observée est souvent modifiée en une grandeur intermédiaire non électrique : c’est le corps d’épreuve. On transforme l’observation indirecte du phénomène (le mesurande secondaire) en signal électrique (tension ou intensité) via le transducteur électrique.

En adaptant le signal électrique créé grâce au conditionneur, le capteur est qualifié de :
capteur analogique, si le signal mesuré est continu dans le temps et borné dans un intervalle de valeurs,
capteur numérique (ou digital) si, par le biais d’une « intelligence embarquée » (la conversion analogique numérique), le signal mesuré est transformé en nombres entiers associés à des valeurs non continues.

Comment rechercher et choisir un capteur ?
Certains penseraient simplement : en ré-utilisant celui utilisé sur une carte déjà produite... Mais comment l'identifier et sur quels critères de choix ?
Un des premiers critères est la capacité à observer, sans dénaturer, le phénomène observé dans l’ensemble de sa plage de variation, en délivrant un signal électrique image du mesurande : c’est la sensibilité du capteur.

Considérons, pour illustrer la démarche, la recherche d’un capteur de température. Et résumons, dans le tableau ci-après, les critères de choix pour trois références issues de trois fabricants.
Les paramètres renseignés dans ce tableau sont issus de la documentation des constructeurs — ou datasheet — dont il est nécessaire de se familiariser à la lecture.
Téléchargez le datasheet du LM35 sur votre navigateur web, simplement par la commande "LM35 pdf" .
La première prise de contact peut rebuter le concepteur puisque ce document comptabilise 38 pages !
Sont-elles toutes utiles ?
Assurément "OUI !"
Peut-on y consentir le temps nécessaire à analyser toutes les pages ?
Assurément "NON !"
Un datasheet doit, dans un premier temps, être parcouru rapidement pour pré-rechercher des paramètres de comparaison. Puis, ce sera le service achat qui vous accompagnera dans le choix, dès lors que les spécifications techniques du besoin seront garanties par des références équivalentes.
Dans la lecture de la première page, 7 zones sont à identifier :
Zone 1 : Constructeur et révisions - Les composants pouvant évoluer depuis leur création, les constructeurs tracent ces évolutions afin d’éviter de prendre en considération des informations erronées.
Zone 2 : Composant et fonction principale
Zone 3 : Caractéristiques et points forts - Avec l’habitude, c’est à la lecture de ces informations que le concepteur retient, ou pas, le composant, pour construire une analyse comparative entre plusieurs composants aptes à convenir à une application. À noter que les valeurs présentées concernent bien souvent une condition d’usage singulière. Par exemple, il faudra vérifier si la précision de 0,5°C est garantie à une température de 40°C.
Zone 4 : Applications - Des exemples de domaines sont énoncés à titre d’illustration. Ceci peut présenter un avantage pour les domaines qui ont des exigences sur la conformité avec des normes (cas de l’automobile, du médical ou de l’aéronautique par exemple).
Zone 5 : Description synthétique - Ici, le fabricant décrit les avantages du composant en se focalisant particulièrement sur ses points forts, tout en anticipant d’éventuels problèmes techniques de mise en œuvre (pas de calibration nécessaire, l’impédance de sortie est linéaire, le composant est alimenté en tension asymétrique…).
Zone 6 : Information mécanique du boîtier - Cela permet au concepteur d’évaluer la place occupée par le capteur sur la carte, les contraintes de placement/routage (boîtier disponible en version traversant ou CMS/SMD, nom du boîtier :TO-92, SOIC, TO-220...).
Zone 7 : Exemple de mise en œuvre - Ces schémas sont utiles pour évaluer d’un coup d’œil le niveau de complexité de mise en œuvre du composant. Par exemple, pour une application contrainte en intégration, le concepteur évaluera le nombre de composants externes nécessaires (et implicitement le coût supplémentaire).

Analysons la seconde page, qui présente la table des matières et donc l’organisation du document, sans une lecture chronologique minutieuse. En pratique, un datasheet n’a pas besoin d’être lu dans son intégralité pour un premier choix — voire même pour un choix final — car tous les éléments décrits rassemblent de multiples cas d’utilisation ou des paramètres dépendant de l’applicatif.

Les paramètres à extraire sont assez systématiquement ordonnés dans les sections suivantes :
Specifications : cette partie du document liste, de manière exhaustive, les caractéristiques électriques et temporelles du composant avec
les valeurs critiques maximales que le composant peut supporter (Absolute Maximun Operating Conditions). Ce sont des valeurs de tension/courant/température qui ne doivent pas être sélectionnées sous peine de détérioration ou de destruction du composant.
La liste de l’intégralité des caractéristiques électriques du composant(Electrical Characteristics) en spécifiant, un peu comme une gaussienne, les valeurs minimales, maximales et typiques. Pour son dimensionnement, le concepteur évitera de ne considérer systématiquement que les valeurs typiques, avec le risque de ne pas garantir le fonctionnement pour des composants « non triés », dont les paramètres prendraient des valeurs extremum.
Detailed description : cette partie du document illustre la structure générale du composant en s’appuyant sur des blocs fonctionnels. Elle permet au concepteur de mieux comprendre l’organisation interne de l’architecture.
Application and implementation : lorsque le composant est relativement simple à mettre en œuvre (c’est le cas ici), le constructeur donne une série d’exemples de mise en œuvre, présentée sous la forme de schématique réutilisable directement ou suffisamment explicite pour que le concepteur puisse procéder à un redimensionnement adapté à son besoin. Pour des composants plus complexes, le fabricant fait référence à des documents dédiés (Application Notes, Design Reference, User Guide, etc.).
Power supply recommandations, layout : cette partie énumère une liste de recommandations technologiques pour garantir des conditions nominales de fonctionnement du composant. Usuellement, les instructions ciblent des choix technologiques de condensateurs (nature du diélectrique et valeur en µF/nF) pour garantir un découplage de l’alimentation. Les recommandations ciblent également le routage du PCB. À ce titre, le constructeur donnera des informations précises sur la position relative du condensateur, des informations sur les pistes de cuivre (simple piste, plan de connexion), les vias (connecté au GND, AnalogGND, PowerGND , etc.).
Mechanical, Packaging : outre les dimensions géométriques du composant, on retrouve ici l’ensemble des informations mécaniques nécessaires au routage du PCB, ainsi qu’à son assemblage. Chaque package est désigné par un nom spécifique (TO-92, SOIC), pour lequel le concepteur trouve les dimensions nécessaires au dessin des empreintes du composant (Footprint), ainsi que les ouvertures géométriques du masque à sérigraphier. On prendra soin de bien vérifier si les dimensions sont exprimées en millimètre (mm) ou en inch (in) et on évitera de confondre les vues top et bottom !
Orderable Information : il s’agit d’un tableau qui liste la référence exacte du composant. C’est la référence qui est mentionnée dans les bases de données des distributeurs. Une attention particulière doit être portée car, à une lettre près, le package du composant est différent. A titre d’exemple le LM35DT est muni d’un package TO-220 alors que le LM35DM est de type SOIC !
Construisez le schéma électrique équivalent d’un capteur
On modélise le capteur en construisant un modèle électrique de type générateur tension (modèle de Thévenin), générateur de courant (modèle de Norton) ou impédance associant une combinaison d’éléments RLC.

Appliquons cette approche sur l’exemple de trois capteurs de température : le LM35, le TMP17, ainsi que la thermistance de la série NTCLE213E3 à Coefficient de Température Négatif ( CTN). À l’aune des données à extraire des trois datasheets constructeur, on construit les modèles électriques des capteurs.
Exemple de modélisation du LM35 :
Le datasheet indique une sensibilité du capteur de +10mV/°C sur la plage de température 2°C à 150°C, avec une précision de +0.5°C. Concernant l’impédance de sortie, le constructeur donne une valeur de 0.1Ω lorsque celle-ci est parcourue par un courant de 1mA .
On construit ainsi le modèle électrique de type générateur de tension (ici commandé en température), avec une fem Vth=+10mV par °C connectée en série avec une résistance de Rth=0.1Ω .
Exemple de modélisation du TMP17 :
Ici, on note une sensibilité de 1µA/K(Kelvin) sur la plage de température -40°C à 105°C, sans information directe de l’impédance de sortie !
Comment déterminer le modèle équivalent?
Dans la description du capteur, le constructeur mentionne que le capteur se comporte comme une source de courant dépendante de la température et mentionne que l’impédance est élevée. Ceci conduit à un modèle de type source de courant idéale avec une résistance parallèle infinie.
Néanmoins, en poursuivant l’analyse (figure 3 p.4 du datasheet), apparaît la notion d’impédance de sortie du montage, qui est conférée par le conditionneur du capteur. Sachant que la sensibilité du capteur vaut 1µA/K , on déduit que la résistance du conditionneur doit être ajustée à exactement 1kΩ pour obtenir une tension de sortie égale à 1mV/K ; d’où le schéma électrique équivalent.

Exemple de modélisation de la thermistance NTCLE213E3103FHT1
C’est donc une thermistance issue de la série NTCLE213E3, où "103FHT1", qui est la fin de la référence, signifie :
103 : en fait doit être lu 103 car c’est la valeur de la résistance à la température de 25°C, qui vaut R25=103Ω=10kΩ(tableau en bas de p. 1 du datasheet).
F : indique la tolérance de la résistance R25 à T=25°C (cf. p.1 tolérance de 1% pour R25).
H : cette lettre permet de déduire le coefficient bêta noté β25/85 , qui représente la sensibilité thermique de la thermistance, soit β25/85=3984Kavec une tolérance de +/-0.5% . L’indice 25/85 signifie que la valeur de bêta est garantie dans la plage de température 25°C à 85°C. En dehors de cette plage, le coefficient β25/85 peut dériver.
T1 : c’est le conditionnement du composant ; T1 pour Tape (bande) ; Reel (bobine).
La variation de la résistance à la température est spécifiée par l’expression fournie :
R(T)=R25exp[B25/85(1T−1T25)]
On doit y observer la variation non linéaire, d’où la difficulté d’exploiter une thermistance pour fabriquer un thermomètre !
Le modèle équivalent de la thermistance se résume donc à une résistance de 10kΩ à 25°C, dont le coefficient de sensibilité égale 3984K et qui varie selon :
R(T)=10000exp[3984(1T−125)]
Nous venons d’apprendre comment à partir de la documentation constructeur d’un capteur on construit son schéma électrique équivalent.
Comment un signal est–il transformé au travers d’un montage électronique ? Comment s’affranchir c’une modélisation par une équation différentielle ? C’est le concept de fonction de transfert qui est abordé dans le chapitre suivant.