Reconnaître et réguler vos émotions, comprendre l’autre tout en étant assertif vous rend apte à l’écoute active et à la communication positive, leviers importants du traitement des conflits.
Maîtrisez l'écoute active
C'est parce que vous aurez écouté et su entendre les dits et les non-dits du conflit que vous pourrez trouver des solutions efficaces.
C'est une compétence à acquérir, car elle est contre-intuitive. En situation de conflit, ce sont surtout les interruptions, les empêchements, les chevauchements de parole et les dialogues de sourds qui priment !
Sachez entendre
C’est une qualité nécessaire à l’évaluation des causes et au diagnostic. Cela vous demande un savoir-être spécifique. Voici les bonnes pratiques :
Je souhaite sincèrement comprendre et j'ai d'ailleurs une réelle curiosité envers le mode de pensée de mon interlocuteur.
Je reporte le moment de m’exprimer qui viendra : je n'interromps pas.
Dans le temps d’écoute, je suis concentré à 100 % sur ce que dit mon interlocuteur parce que je serai concentré à 100 % sur ce que je dirai quand mon tour de parole viendra.
Mon expression de visage est neutre, ma posture est ouverte, tournée vers mon interlocuteur.
J’alterne avec naturel le regard frontal (non agressif) et les moments de décrochage du regard (lorsque je suis concentré sur ce qui est dit).
J’ai un avis sur la situation tout en me laissant la possibilité d’évoluer.
Ce n’est pas parce que j’écoute et laisse parler sans interrompre que je suis d’accord avec tout ; je laisse à mon interlocuteur la responsabilité de ses paroles.
J’écoute sans rejeter, ni ajouter, ni modifier. Je ne me projette pas dans ce qui est dit.
Je suis concentré et donc je peux identifier les idées (le verbal), percevoir l’état émotionnel (le non-verbal) et éventuellement repérer les moments de non-congruence entre les deux.
Cela vous demande aussi la capacité de contourner les obstacles :
Si j’ai peur de ne pas avoir de temps de parole ensuite (fuite ou manque de temps), je me mets d’accord avec mon interlocuteur à l’avance.
Si j’ai peur d’oublier des éléments de ce qui est dit, je note des mots-clés.
Si je ne comprends pas quelque chose, je note pour questionner plus tard.
Si mon interlocuteur parle sous le coup de l’émotion (décharge), je le/la laisse parler ("vider son sac") et suis discret.
J’ignore les provocations inconscientes ou délibérées, qui sont parfois d’ailleurs le fruit de mon interprétation. Mon silence et mon sang-froid paieront sur le long terme.
Si j’ai une envie forcenée d’interrompre, je me sers lentement un verre d’eau, ou je compte lentement jusqu’à 10 dans ma tête, ou encore je m’éloigne discrètement et fais quelques inspirations/expirations de relaxation.
Si mon interlocuteur cherche ses mots, je ne finis pas ses phrases pour lui/elle ; j’attends sans manifester d’impatience.
Si mon interlocuteur prend un temps d’expression déraisonnable (dont un indice fiable est qu’il/elle se répète depuis un moment), je demande la parole, sans agressivité :
« J’ai bien écouté ce que tu as dit, je voudrais maintenant te répondre. »
Si cette posture d'écoute est difficile à tenir malgré tous vos efforts, soit par ce que votre émotion est trop vive, soit du fait de provocations ou d'un manque total de réciprocité, demandez calmement un report de la conversation en le planifiant.
Sachez reformuler
La reformulation joue un rôle fondamental, à plusieurs niveaux :
D’abord, elle permet de valider que vous avez bien compris ce qui a été dit.
Ensuite, elle vous valorise en prouvant que savez écouter et vous contrôler.
Elle valorise également votre interlocuteur dont le droit à s’exprimer est ainsi reconnu, ce qui contribue à la construction du dialogue.
Enfin, la reformulation (si elle est synthétique et neutre) est une respiration dans un échange tendu et diminue la pression.
Reformuler, c’est :
Résumer : « En résumé, je retiens que… c’est bien ça ? »
Clarifier : « Ce que tu veux dire, c’est que… ? » La clarification peut s’appliquer aux idées comme au ressenti : « Tu t’attendais à autre chose ? », « Et ça vous a surpris ? »
Recentrer, en cas d’enlisement ou de digression : « Reprenons sur… », « Passons à… »
Sachez questionner
Poser des questions vous permet de compléter votre diagnostic de la situation sur la base de faits réels en confirmant ou non vos hypothèses. Questionnez plutôt qu’imaginez ! Ne projetez pas, n'interprétez pas : restez factuel ! Poser des questions permet aussi de révéler le non-dit, avec prudence et tact.
Si l’on vous dit « je suis toujours très ponctuel », vous pouvez questionner ainsi : « Ce que tu veux dire, c’est que c’est un vrai effort pour toi de faire la route depuis ton domicile ? » Cela peut mener à : « En d’autres termes, tu souhaiterais changer d’horaires ? » Ou bien : « Oui, et c’est la preuve que vous aimez la rigueur, n’est-ce pas ? »
Un questionnement efficace associe trois dimensions :
Questionner la perception des faits avec des questions ouvertes en phase exploratoire (que/quoi/quand/comment/combien ?), ou fermées pour les détails (est-ce que… ? avec réponse en « oui » ou « non »). Ici, n’hésitez pas à approfondir (« qu’en pensez-vous ? », « en quoi... ? par rapport à quoi ? c’est-à-dire ? »).
Questionner les motivations, donc les buts et les besoins : pourquoi ? comment ? (« qu’attends-tu de notre collaboration ? », « vous préférez ceci ou cela ? », etc.)
Questionner les sentiments et émotions : « Quel est ton sentiment sur ce blocage ? », « Qu’est-ce qui vous agace ? », « De quoi doutes-tu ? » Si votre interlocuteur/trice n’est pas très loquace : « Ne penses-tu pas que… ? »
Soyez également attentif au silence de votre interlocuteur. S’agit-il d’un silence admiratif, complice, approbateur, évaluateur, méprisant, absent ?
Pour être pleinement efficace, l'écoute active doit s'accompagner d'une communication positive.
Communiquez clairement et positivement
Une communication est réussie quand ce que pense celui/celle qui s’exprime est entendu et compris par celui/celle qui écoute qui peut ensuite en faire « bon usage ».
Ce processus comporte 9 niveaux - 9 filtres déformants - qui occasionnent à chaque fois une perte sur l’intention d’origine :
Ce que je pense
Ce que je veux dire
Ce que je dis
Ce qu'il/elle entend
Ce qu'il/elle écoute
Ce qu'il/elle comprend
Ce qu'il/elle accepte
Ce qu'il/elle retient
Ce qu'il/elle en fait
En situation de conflit, en général, le niveau émotionnel augmente, l'écoute diminue et donc le message et sa réception sont encore plus brouillés !
C’est un véritable défi d’être compris et d'avoir un dialogue suivi d’effets ! Mettez toutes vos chances de votre côté et soyez aussi clair et positif que possible. En plus de la gestion des émotions et des techniques d’écoute active, le processus peut encore être amélioré.
Soyez clair et précis
Lorsque nous nous exprimons, nous avons des habitudes qui peuvent rendre nos paroles équivoques et augmenter le risque de malentendu, quand par exemple :
Nous oublions une partie de la phrase : « Vous n’avez pas écouté. » Écouté quoi ?
Nous oublions de préciser le sujet de la phrase, qui fait l’action : nous abusons des « on », « les gens », « ils/elles » qui diluent les responsabilités et permettent toutes les interprétations.
Nous abusons des généralisations : « Les ingénieurs sont… », « Vous dites toujours… », « Les commerciaux ne font jamais… », « La génération Y n’aime pas… »
Nous affirmons ce qui est une supposition : « Il a menti », « Je sens qu’il/elle a oublié d’en parler ».
Sans parler des rumeurs que nous relayons et qui compromettent l’ambiance et la coopération. Les rumeurs sont un excellent carburant du conflit : préférez l’abstention ou la vérification des faits (fact checking).
On résume : évitez les phrases incomplètes qui prêtent à confusion, les généralisations, les "on-dit", et privilégiez la clarté et la précision en vous concentrant sur les faits, rien que les faits !
Utilisez des phrases et un vocabulaire positifs
Parfois, nous prenons l’habitude d’utiliser des tournures de phrases et des termes négatifs qui brouillent la réception de nos paroles. Inversez cette habitude et positivez !
Prêtez attention à votre vocabulaire. Avez-vous tendance à utiliser des mots à connotation négative tels que : exiger, échouer, négliger, toujours, jamais, faux, vouloir, obligatoire, incapable, réclamer, moquer, etc. ? Utilisez plutôt des termes à connotation neutre ou positive tels que : bénéfice, accepter, juste, équitable, proposition, excellent, souhaiter, hypothèse, possibilité, discuter, option, etc.
De même, vous pouvez travailler sur vos tournures de phrases. Voici comment vous pouvez les transformer.
Tournures négatives | Tournures positives |
Vous | Nous |
Vous n'avez pas... | Il n'a pas été possible de... |
Je veux... | Que pensez-vous de... ? |
Ce que vous demandez est impossible | Il y a des points intéressants, mais nous devons réfléchir à... |
Votre décision est injuste | Votre décision peut être améliorée en termes d'équité |
C'est interdit/impossible | Examinons les options possibles |
Sachez dire non en restant positif
Il est possible de refuser ou de dire son désaccord sans accuser ou culpabiliser l’autre (particulièrement contre-productif). Pour cela, procédez en 3 temps :
1- Annoncez les faits : « Je ne peux plus déjeuner avec vous à midi » / « Je ne peux pas m’occuper de cet appel d’offres »
2- Parlez de vos besoins, de ce que cela vous fait : « J’ai besoin de faire du sport pour décompresser » / « Je connais mal le domaine d’activité et je risque de faire des erreurs »
3- Sollicitez une autre option : « ... et je suis partant pour un dîner avec toute l’équipe quand vous voulez ! » / « Penses-tu que je peux obtenir une formation ? » Ou bien : « Je peux peut-être t’aider sur autre chose ? » / « Est-ce que tu penses à quelqu’un d’autre pour s’en occuper ? »
N'attendez pas : entraînez-vous à l'écoute active et à la communication positive avec vos proches, vous en tirerez des bénéfices qui rejailliront sur votre vie professionnelle...
En résumé
Traiter un conflit va vous demander de maîtriser votre communication, c'est-à-dire votre capacité à écouter et à vous exprimer de façon précise et conciliatrice :
grâce aux techniques d'écoute active, vous savez entendre, reformuler et questionner afin d'accéder aux non-dits du problème.
grâce aux techniques de communication positive (clarté, précision, vérification des faits, pas de généralisations, pas d'interprétation, positivité de l'expression), vous mettez toutes vos chances de votre côté pour être entendu !
Dans cette deuxième partie, nous avons vu comment :
écouter, reconnaître et réguler vos émotions ;
développer votre perception des états émotionnels chez vos interlocuteurs ;
communiquer clairement et positivement.
Vous êtes maintenant prêt à appliquer la méthode de résolution des conflits !