Nous avons vu plusieurs méthodes existent pour analyser et cartographier l’expérience utilisateur :
La “customer journey map” : une carte du parcours client qui focalise sur les points de contact.
L’“empathy map” : une carte introspective de l’utilisateur pour extraire les points de friction et les motivations.
L’“experience map” : une carte du parcours utilisateur qui focalise sur les ressentis et la courbe d’expérience.
Le “service Blueprint” : une carte du parcours utilisateur qui focalise sur les interactions avec l’organisation et identifie les impacts sur les collaborateurs et les processus.
Ces méthodes conduisent à représenter visuellement tout ou partie de l’expérience en mettant en perspective la recherche utilisateur. Pour autant, ce ne sont pas des livrables ni des représentations figées définitivement.
Ces cartes peuvent être exploitées pour générer les meilleures idées de solutions possibles.
Comment générer des solutions basées sur l’UX mapping ?
Même si des idées de solutions vous viennent naturellement ou vous paraissent évidentes, notez-les à part sur des post-it. Il vaut mieux procéder méthodiquement pour exploiter toute la richesse de vos cartes.
4 étapes sont nécessaires pour trouver ces solutions :
Étape 1 : Détecter les points de faiblesses, les points chauds et les zones de confusion dans l’expérience
Rappelons que l’objectif est de créer la meilleure expérience possible (nouveau produit ou service) ou d’améliorer l’expérience. Il faut donc proposer des solutions en réponse aux problèmes rencontrés par l’utilisateur. Souvent, nous voulons proposer des idées de solutions avant même d’avoir même vraiment bien identifié le problème.
“Si j’avais 1 heure pour sauver le monde, je passerais 55 minutes à cerner le problème, puis 5 minutes à la résoudre.” Citation d'Albert Einstein
La méthode de la carte d’expérience favorise grandement le repérage des problèmes grâce à la courbe d’expérience, et en particulier ses points bas.
Voici le parcours du voyageur TGV pro qui prend son train pour un trajet professionnel le matin. Nous avons choisi un moment juste avant le voyage (comment il se rend à la gare) et pendant l’expérience de voyage. Le parcours est ultra simple, en 5 étapes : je réserve, je me gare, je trouve ma rame, je prends un café, je dois prévenir de mon retard.
Plus les écarts sont importants entre expérience positive et négative, plus la perception globale de l’utilisateur sera mauvaise. Il faut donc non seulement relever l’expérience (zone de zébra rouge sur la photo ci-dessous), mais aussi veiller à lisser la courbe vers le haut, en évitant les accidents de parcours.
Étape 2 : Identifier les opportunités de conception
Sur l’exemple du voyageur TGV, les plus gros points de friction sont :
“Je me gare à la gare”, car le voyageur ne trouve pas forcément de place (il n’est pas rare que le parking soit déjà plein, même tôt le matin).
“Je vais être en retard, car le train est en retard” ; en effet, il va falloir qu’il informe les personnes qui l’attendent en rendez-vous ou en réunion (son entreprise ou des clients).
Plusieurs opportunités naissent de ce constat :
Comment prévenir le voyageur s’il y a de la place au parking de la gare (ou ailleurs), et ce quelques minutes avant qu’il arrive en gare en voiture ?
Comment lui faciliter la vie pour prévenir son rendez-vous client si le TGV a du retard ? (en indiquant le temps de retard estimé)
Étape 3 : Prioriser les opportunités
Vous aurez plus envie de poster des commentaires de mécontentement sur internet que de prendre la peine d’écrire un avis positif. Si l'on fait une analogie, il est beaucoup plus facile de relever une expérience négative que de sublimer une expérience déjà au top !
Donc concentrez-vous sur les parties de l’expérience ou les ressentis qui sont les plus difficiles à vivre pour l’utilisateur et aussi les sentiments de forte confusion (l’utilisateur est perdu, il ne sait pas quoi faire ou il ne sait pas comment le faire).
Pour “customer journey map” : des verbatims négatifs au point de contact
Pour “empathy map” : les points de friction “pain point”
Pour “experience map” : les points bas de la courbe d’expérience
Pour “service Blueprint” : tout ce qui se passe en coulisses sous la ligne de visibilité
D’accord, mais comment prioriser ?
Si vous vous demandez par quoi commencer quand vous avez terminé vos cartes d’expériences, posez-vous les questions suivantes :
Quel est le point le plus bas de la courbe d’expérience ?
Quelle est l’action critique d’engagement de l’utilisateur (inscription, achat, recommandation) et où est-elle sur votre visuel ?
Qu’est-ce qui demande peu d’effort à mettre en place, mais apportera un grand confort à l’utilisateur ?
Pour notre voyageur pro, rater son train parce qu’il ne trouve pas de place de parking est plus critique que de gérer un retard. Donc commencez par lui assurer qu’il peut se garer au plus près. Bien évidemment, cela ne concerne pas tous les voyageurs et tout dépend du contexte. À Paris, la recherche utilisateur montre que la plupart des voyageurs pros arrivent par les transports, en Uber ou en taxi. À Lyon, c’est moitié-moitié. Mais à Valence ou à Aix, les gares TGV sont en dehors de la ville, donc les personnes prennent quasiment toutes la voiture pour venir en gare.
Cependant, via l’application mobile OUI.sncf, il semble facile d’ajouter une fonctionnalité pour signaler son retard à un contact pro. C’est une opportunité qui mérite d’être considérée, car elle semble demander peu d’efforts. C’est pourquoi vous allez en plus identifier qui est responsable de cette activité, probablement la direction informatique.
Étape 4 : Transformer les opportunités en solutions (idéation)
Il faut bien distinguer :
Les opportunités : que faut-il améliorer ?
Les solutions : comment faut-il améliorer ?
Pour une seule et même opportunité, vous pouvez générer de l’idée avec votre équipe et trouver plusieurs solutions. Reprenez le cours Communiquez et formalisez vos idées par le storytelling pour pratiquer les techniques d’idéation (libre, contrainte et inversée).
Pour finir sur notre cas du voyageur pro, nous avons retenu le signalement d’un retard auprès d’un contact du voyageur. C’était l’opportunité de conception. Explorons une des solutions : le signalement du retard peut être disponible sur l’écran de détail du voyage. Il suffit d’y ajouter un bouton “prévenir de mon retard” pour choisir son contact dans le répertoire smartphone, puis de choisir son canal de communication, c’est-à-dire le texto, l’e-mail ou encore une application de messagerie instantanée, comme Messenger, Whatsapp, Slack.
Aujourd’hui, dans l’application mobile OUI.sncf sur Android (octobre 2018), il est possible de partager son voyage avec un proche et donc de prévenir de son heure d’arrivée théorique, mais pas (encore) d’indiquer si le train a des problèmes ou du retard !
Communiquer avec les équipes
Vous devez aussi exploiter vos cartes comme une tactique de communication pour convaincre et embarquer votre équipe, les interlocuteurs des métiers ou vos clients. Nous souhaitons que cette vision partagée sur l’expérience de nos utilisateurs au contact de nos produits puisse s’enrichir et vivre dans le temps !
Servez-vous de vos supports haute fidélité pour raconter l’histoire de l’utilisateur. Le parcours montre un ancrage dans la réalité, les verbatims et ressentis humanisent votre persona, votre storytelling finit de crédibiliser ce qui se passe sur le terrain.
Vos travaux sur la cartographie de l’expérience vont permettre de :
Impliquer les parties prenantes
Trouver des alliés et les embarquer dans une vision partagée
Valoriser votre travail de recherche, car vous avez découvert ce que l’entreprise ne sait pas
Résumons
Les cartes d’expériences ne sont pas des livrables, mais des révélateurs d’expérience à améliorer.
Procédez par étape pour identifier, choisir et exploiter les opportunités de conception.
L’objectif est bien de tirer l’expérience vers le haut, de manière homogène, sans accidents de parcours.
Repassez par des séances d’idéation pour générer des solutions à partir des opportunités détectées.
Servez-vous de vos résultats pour communiquer et convaincre.