Voyons à présent plus en détail le rôle et les missions du service Méthodes, ainsi que son positionnement dans l’entreprise. Vous verrez, dans ce chapitre, qu’ils sont nombreux. En tant que responsable, il vous faudra faire preuve d’adaptabilité. :)
Situez le service Méthodes dans l’entreprise
Avant de nous intéresser aux missions et rôles du service Méthodes dans une industrie, voyons d’abord où celui-ci se situe dans l’entreprise.
Dans la plupart des organisations, le service Méthodes se trouve entre le bureau d’études et la production. L’organigramme ci-dessous représente l’évolution du produit, c’est-à-dire son processus de fabrication. Vous pouvez constater que le service Méthodes occupe une place centrale :
Le service Méthodes est donc l’interface entre le bureau d’études et la production, il se situe au cœur du processus global de l’entreprise.
Son positionnement dépend de la taille et de l’activité de l’entreprise. Ainsi, en fonction du nombre de salariés, il peut y avoir quelques différences, comme expliqué dans le tableau qui suit :
Moins de 50 salariés | Entre 50 et 200 salariés | Plus de 200 salariés |
Il n’y a pas nécessairement de service Méthodes. L’industrialisation est souvent gérée par le bureau d’études et la fonction amélioration par la gestion de production. | Le bureau des Méthodes est souvent né d’un besoin de structurer la production dans une période de forte croissance. Il existe donc, mais parfois, les rôles ne sont pas parfaitement définis. | Le bureau des Méthodes est clairement nécessaire et établi. La difficulté peut résider dans la répartition des missions entre industrialiser et améliorer. |
Industrialisez un nouveau produit
Comme vous avez pu le comprendre, un des rôles du service Méthodes est de passer de « l’idée » d’un produit à sa réalisation et à sa production en plus ou moins grande série. C’est ce que l’on appelle l’"industrialisation".
Intéressons-nous plus en détail à ce terme :
L’industrialisation s’inscrit dans une démarche générale de mise sur le marché d’un nouveau produit qui part de la recherche et qui se poursuit jusqu’à la production à échelle industrielle.
Techniques de l’Ingénieur "Industrialisation et systèmes industriels" Michel Auroy - Date de publication : octobre 1999
Il existe deux principaux modes d’industrialisation :
Le taylorisme (travail à la chaîne) a introduit une mode d’industrialisation séquentielle au cours de laquelle chaque étape démarre quand la précédente est complètement achevée.
Dès les années 1970, au Japon, on tend à introduire une nouvelle ingénierie qui sera reprise dans les années 1980 aux États-Unis afin d’accélérer le processus : il s’agit de l’ingénierie simultanée, également appelée concourante. Cette méthode consiste à engager simultanément tous les acteurs d’un projet, dès le début, dans la compréhension des objectifs recherchés ; tous les protagonistes ont ainsi la vision des actions à réaliser.
Dans ce type d’ingénierie, les équipes travaillent en parallèle pour faire avancer le projet.
Comme vous pouvez l’imaginer, cela nécessite une bonne organisation des canaux de communication afin que les actions soient correctement menées. Le service Méthodes est directement impliqué dans ce type de démarche, puisqu’il est au cœur de l’industrialisation des produits et doit, comme nous le verrons dans le prochain chapitre, interagir avec plusieurs services.
Comme vous pouvez certainement le deviner, le principal avantage de cette méthode est de réduire les délais pour lancer un produit sur le marché.
Ce schéma l’illustre de manière explicite :
Il faut cependant rester vigilant au transfert d’information et à la communication qui restent essentiels au bon déroulement de ce type d’organisation. Une bonne communication et une bonne gestion de projet sont indispensables !
Choisissez la méthode de production la plus adaptée
Vous avez vu que l’ingénierie ou industrialisation simultanée était la méthode la plus adaptée à un projet d’industrialisation. Intéressons-nous maintenant au choix du mode de production.
En effet, selon le produit à industrialiser, les exigences clients, les quantités et le secteur d’activité, le mode de production va varier.
Joan Woodward, chercheuse britannique en sociologie des organisations et particulièrement sur le thème des liens entre technologies, systèmes de production et structures organisationnelles, a établi la typologie suivante :
La production par projet : « L’objet à réaliser est souvent complexe et/ou de haute technicité (ouvrage d’art, navire, satellite...). Les problèmes majeurs à résoudre ressortissent aux coûts et aux délais. L’accent est mis sur les fonctions Études et Ordonnancement. L’organisation est conditionnée par l’impératif de flexibilité. »
La production en continu : « Il s’agit de réaliser un flux de produits (hydrocarbures, électricité, sidérurgie...) en fonction d’un objectif de volume qui oriente les choix techniques et détermine en grande partie les coûts. L’intégration des opérations est souvent un impératif, ce qui explique le fort degré d’automatisation des processus ». Ce type de configuration est très peu flexible, ce qui peut poser problème en cas de variation brusque ou importante (à la hausse ou à la baisse) de la demande.
La production de masse : « L’objectif est de réaliser des produits standardisés en très grande quantité afin de bénéficier d’économies d’échelle. Les équipements sont spécialisés par opérations et/ou type de produits. C’est le domaine par excellence du travail à la chaîne avec une main-d’œuvre peu qualifiée. » Une telle organisation n’est pas non plus particulièrement flexible.
La production de petites séries : « C’est une situation intermédiaire en la production par projet et la production de masse. Le système est alors organisé en ateliers spécialisés (par opération et/ou par produit) où sont regroupés des équipements polyvalents et une main-d’œuvre qualifiée. Un arbitrage doit être réalisé entre productivité (compétitivité par les coûts) et flexibilité (pour répondre à des demandes spécifiques et tenir les délais.) Ce système en réalité hybride peut évoluer vers la production de masse si la demande se stabilise et les volumes augmentent. Dans le cas inverse, il tend vers une organisation par projet. »
Pour synthétiser, ces 4 catégories de production peuvent être rangées dans ce tableau :
| Faible quantité | Grande quantité |
Produit unique | (1) Production par projet (ex. : bateau) | (2) Production en continu (ex. : électricité) |
Produits multiples | (4) Production de petites séries (ex. : outillages spécialisés) | (3) Production de masse (ex. : électroménager) |
Ainsi, le service Méthodes doit préconiser le mode de production optimal en fonction du type de produits et des quantités à produire.
Documentez le processus
Une fois que le process a été correctement défini, il faut aussi documenter toutes les étapes de ce dernier. C’est donc la suite logique des rôles du service Méthodes.
Des techniciens (ou préparateurs dans l’industrie aéronautique) vont donc rédiger les modes opératoires, appelés "gammes" dans le monde industriel. Il s’agit d’écrire sous forme de texte, de schémas ou de photos, le déroulé opératoire avec les différentes étapes à chaque poste opératoire.
Cela concerne des gammes de fabrication, d’inspection ou de contrôle, mais aussi toutes les opérations nécessaires. C’est véritablement la marche à suivre pour les opérateurs. Ils ne doivent pas avoir de doute ou d’interrogation à la lecture de ces documents. C’est comme la notice de montage d’un meuble ! Une attention particulière et une lecture croisée sont indispensables pour valider les documents.
La documentation réside aussi dans les fabrications d’outillage. Le service Méthodes définit les plans des outillages nécessaires à l’industrialisation.
Enfin, un support formation sur machine est également du ressort du service Méthodes. Cette étape se déroule en collaboration avec le service Formation de l’entreprise qui pourra l’intégrer à son plan de formation global.
Améliorez le processus
Une fois l’industrialisation réalisée, on passe en phase de production. Il est malheureusement très rare que tout se passe comme nous l’avions prévu !
Ainsi, les premiers retours de ce qui ne fonctionne pas arrivent et c’est le service Méthodes qui doit, en partenariat avec d’autres services, résoudre les problèmes de dysfonctionnement. Il peut s’agir de réglage de machines, de manque de clarté dans les documents, etc.
Le schéma ci-dessous synthétise le rôle des Méthodes au service de la production :
Ce chapitre vous a donc montré à quel point les missions du service des Méthodes étaient diverses et importantes dans la stratégie d’une entreprise. Ce service est central dans l’entreprise ; de ce fait, il est très souvent en relation avec beaucoup d’autres secteurs. Ce sont ces interactions interservices que je vais vous présenter dans le prochain chapitre !