(Re)Découvrez les objections
Dans nos environnements professionnels, toutes nos relations ne sont pas un long fleuve tranquille. Eh oui, les entreprises sont composées d’humains qui interagissent les uns avec les autres : parfois de manière fluide et simple, et parfois avec certains… accrochages.
Quand on parle du sens du service, on ne peut pas passer à côté du sujet des objections : qu’on le veuille ou non, le fait de proposer un service nous mènera forcément, à un moment ou à un autre, à une discussion (par mail, par téléphone, par visio ou de visu) où notre interlocuteur ne sera pas forcément d’accord avec nous et se mettra à exprimer, à tort ou à raison, ses doutes.
Avant d’aller plus loin, posons-nous donc la question : qu’est-ce qu’une objection ?
Le Larousse nous propose la définition suivante :
« Avis, argument, etc., que l'on met en avant pour s'opposer à une proposition, une affirmation. »
Une objection est donc un avis contraire. Dans le cadre du sens du service, je vais me permettre de compléter cette définition :
Une objection est un avis contraire exprimant de manière négative – ou interprétée comme négative – un besoin de notre interlocuteur.
Il va donc falloir aller à la rencontre de votre interlocuteur, comprendre son besoin et pour quelles raisons il l’exprime de cette manière, afin de pouvoir mieux le servir et l’accompagner. En d’autres termes, et pour faire un lien avec le tout début de ce cours, vous allez encore et toujours partir à la découverte de la carte personnelle de votre interlocuteur, de sa perception.
À vous de jouer !
Faisons un exercice. Je vais vous demander de vous rappeler la dernière fois où vous vous êtes retrouvé dans une de ces situations de désaccord avec une personne :
Quelles sont les objections que vous avez reçues et que vous avez eu du mal à gérer ?
Qu’est-ce qu’on vous a dit ?
Sur quelle intonation vous a-t-on parlé (colère, mépris, dégoût, tristesse…) ?
Apprenez à reconnaître vos réactions naturelles
Apprenez également à déculpabiliser par rapport à vos réactions.
Avant d’avancer sur le traitement des objections en soi, il est important d’identifier certains biais naturels que nous pouvons avoir en tant qu’être humain quand nous nous sentons agressés.
Nous pouvons lister 3 biais naturels que les Anglos-Saxons rassemblent sous les termes “Flight, Fight, Freeze” (“S’enfuir, Combattre, Geler”). Je les explique ci-dessous :
1. « Tu m’attaques, je m’en vais » ou « Tu m’attaques, je m’excuse »
Une solution, est simplement de s’en aller ou de s’excuser, de se justifier. Autrement dit, nous allons apporter des preuves de notre bonne foi, de notre innocence partielle ou totale à quelqu’un qui ne nous les demande souvent pas.
La problématique de la justification, même si elle part d’un bon sentiment, c’est qu’elle provoque souvent le rejet ou un sentiment d’irritation de la part de l’autre.
Exemple : «Vous êtes en retard» «Oui mais vous comprenez, mon train a eu un problème et j’ai dû marcher, etc., etc.».
2. « Tu m’attaques, je t’attaque »
Quand nous nous sentons attaqués, une des réactions classiques peut être de contre-attaquer. Cette « contre-attaque » peut se matérialiser par une forme de colère, d’ironie, d’acidité, voire d’un ton « passif-agressif ».
Le problème de cette réaction, c’est qu’elle peut rapidement provoquer une escalade de paroles et de ton qui ira dépasser le problème lui-même.
Exemple : «Je croyais que ce problème serait résolu pour aujourd’hui!» «Eh bien vous n’avez qu’à le résoudre vous-même si vous voulez que ça aille plus vite!».
3. « Tu m’attaques, je me tais »
La dernière réaction, est de ne pas répondre parce qu’on ne supporte pas la manière ou le contenu du message.
Exemple : « Vous me prenez pour qui à la fin?» «…» (bruit de la porte qui se ferme).
La problématique quand on se laisse submerger par une émotion, c'est de ne pas réussir à formuler une idée claire et à potentiellement "déraper" en exprimant notre confusion intérieure, ce qui ne fera pas du tout avancer la situation, au contraire.
En revanche, il peut être intéressant d'apprendre à gérer autrement vos émotions. Si toutes ces solutions peuvent être pertinentes ponctuellement, elles ne sont pas “utilisables” sur le long terme (nous ne pouvons pas passer notre vie à nous justifier ou à fuir).
Rééquilibrez la conversation
Le but d’une gestion d’objection sera souvent de pouvoir (r)établir un équilibre dans la conversation : deux interlocuteurs (ou plus) qui peuvent échanger des idées de manière bienveillante sans que l’un cherche à prendre l’ascendant sur l’autre.
À ce sujet, Sébastien Ermacore, directeur technique chez Netecise et consultant en systèmes d’information précise :
« Quand un utilisateur vient avec un problème, il faut savoir faire preuve de pédagogie, être lucide, et surtout ne pas lui mentir. Il faut être sincère. »
Disons-le tout de suite : ce n’est pas évident (surtout quand les émotions sont fortes) et cela requiert un ingrédient clé – la sincérité, dont une définition est donnée par Marshall Rosenberg, un des papes de la CNV (communication non violente) : « l’expression de ce qui nous anime, plutôt que ce que l’on pense d’autrui ».
Les attitudes de sincérité et de bienveillance sont fondamentales même et surtout lors de votre préparation à des objections (rappelez-vous que vos perceptions influent directement sur votre communication) : avant un rendez-vous difficile, par exemple, ou même dans un travail préalable de préparation des objections communes à votre activité.
Venons-en maintenant à ce qui peut composer une gestion d’objections efficace, ce que vous pouvez préparer :
1. J’écoute activement et j’observe
Quand on vous lance une objection, écoutez d’abord jusqu’au bout ce que votre interlocuteur vous dit, et laissez même un silence après la fin de l’objection.
Déjà parce que cela va lui permettre de « vider son sac » et la plupart des conflits peuvent être réglés de cette manière : le fait de rester en silence permet à votre interlocuteur de s’exprimer, voire de se rendre compte tout seul qu’il est allé trop loin.
De plus, en écoutant activement, vous vous mettez en mode observation, ce qui vous permettra de comprendre plus facilement le besoin de votre interlocuteur. Finalement, si l’objection est forte émotionnellement, ce temps d’écoute va vous servir de « sas », « d’airbag émotionnel » pour pouvoir reprendre la main.
2. J’exprime mon ressenti ou ma pensée en prenant en compte mon interlocuteur
Afin de « reconnecter » avec votre interlocuteur, vous voulez lui signifier que
vous l’avez écouté,
sa remarque vous touche ou vous interpelle. Pour cela, vous allez pouvoir utiliser un outil connu : l’accusé de réception oral.
Le tout ici sera de l’utiliser à bon escient et en fonction des types d’objections que vous recevrez (d’où l’intérêt d’être préparé et entraîné en amont). Celles-ci peuvent être divisées en deux grandes catégories :
les objections rationnelles ;
les objections émotionnelles.
Prenons quelques exemples de situations :
Accusés réception rationnels | Accusés de réception émotionnels |
Oui et... (et pas oui mais...) ou OK | Je ressens de la colère quand vous... |
Je comprends ou j’entends | Ce que tu me dis m’attriste. |
J’ai bien noté | Je suis surpris(e)/étonné(e) quand je t’entends... |
3. Je questionne mon interlocuteur et si besoin, je reformule
Pour bien répondre à une objection, ou plutôt à un ensemble d’objections (elles viennent souvent en groupe), il faudra que vous les compreniez au mieux, et donc que vous interrogiez votre interlocuteur :
soit pour préciser (« Qu’est-ce que vous voulez exactement dire par… ? ») ;
soit pour valider (« Est-ce que vous voulez exprimer que… ? »).
L’avantage de questionner est double, puisqu’en plus d’être plus pertinent dans votre échange, vous reprenez doucement la main sur la conversation (celui qui questionne a souvent plus de chances de mener la conversation). À cette étape, vous pouvez aussi reformuler ce que votre interlocuteur vous exprime, si besoin.
4. Je donne une explication concise si besoin
Dans certains cas, si (et seulement si) vous détectez un questionnement ou un besoin d’explication chez votre interlocuteur, apportez-lui une réponse claire et concise.
5. Je confirme la bonne entente
Finalement, et surtout après un échange houleux, je vous conseille de bien valider la compréhension des deux parties, par exemple en utilisant une phrase du type : « Donc si je comprends bien… ». Cela permet à votre interlocuteur et à vous-même de confirmer vos interprétations mutuelles.
À vous de jouer !
À la suite des objections que vous avez notées au début de ce chapitre, je vous invite à ajouter dans votre carnet de bord :
ce que vous interprétez dans la remarque de votre interlocuteur (le « résultat de votre écoute ») ;
un accusé de réception approprié ;
les questions qui peuvent suivre cette objection, et les explications courtes et concises qui pourraient être nécessaires.
En résumé
Les objections font partie de vos relations : elles expriment des besoins et des opportunités d’échange.
Les réactions « naturelles » – colère, fuite, justification – ne sont pas toujours les bonnes.
Vous pouvez gérer positivement les objections reçues en prenant un temps d’écoute, en prenant en compte vos sentiments et ceux de vos interlocuteurs, et en cherchant ce qu’il ou elle a à vous dire.
Vous êtes désormais capable de vous entraîner à gérer les objections : probablement un des exercices les plus difficiles de ce cours.
Dans d’autres situations, vous allez observer des comportements ou des réactions que vous jugerez inappropriés ou blessants, et vous ne pourrez pas toujours réagir à chaud. Nous allons donc avoir besoin d’une nouvelle posture : le feedback. Rendez-vous au prochain chapitre !