Pour être en capacité de développer de l’IoT, il faut casser l’organisation en silos. Lorsqu’un développement implique de multiples disciplines et domaines, rester dans une logique organisationnelle en silos ne fonctionne pas. Si à chaque fois, chaque intervenant doit demander à son patron de discipline son accord pour pouvoir prendre une décision, pour pouvoir penser... cela devient impossible !
Les plateaux collaboratifs
Dans ce type de fonctionnement, la prise de décision sort de la hiérarchie pour atterrir au niveau de l’équipe de développement. Cela signifie souvent qu’il faut changer le mode de fonctionnement habituel et mettre en place des organisations centrées sur le développement de produits, l’IoT et la collaboration.
Mais dans cette configuration, quel est le rôle de la hiérarchie classique face à une équipe autonome ? La notion d’équipes autonomes a été créée il y a quelques années déjà au niveau des usines, avec les notions d’îlots et d’entreprises libérées. Dans les centres de développement de produits, le concept d’entreprise libérée prend de l’ampleur.
Cela ne signifie pas qu’il n’y ait plus de règles, ni de chef ! L’entreprise libérée met en place des îlots de développement collaboratifs, dans lesquels l’ensemble des disciplines travaillent directement entre elles.
Le partenariat comme relation
L’évolution des relations entre les start-ups et les grosses entreprises est parlant à ce sujet. Aujourd’hui, quand les grosses entreprises travaillent avec des start-ups, elles ne cherchent plus à les absorber. Si elles le font, elles induisent sur la start-up un fonctionnement en silos qui est trop lourd, avec un chef qui veut être le nouveau patron de la start-up. Cela tue l’apport de la start-up, si ce n’est la start-up elle-même !
À présent, les start-ups sont devenues des partenaires des grandes entreprises. C’est absolument fantastique de voir des entreprises de 100 000 ou 150 000 personnes en partenariat avec des entreprises de cinq personnes. La créativité vient de la petite entreprise de cinq personnes. Le fonctionnement classique est, lui, embarqué dans l’entreprise classique. Tout le monde y gagne.
Les conséquences organisationnelles sont lourdes pour le management des ressources humaines. Cela implique, par exemple, de réorganiser totalement le développement de produit, en lançant des “task forces” pour des tâches précises, de générer des “innovation labs” ou “factory labs” dans lesquels les équipes pluridisciplinaires, les tests et validations seront autonomes.
Les conséquences organisationnelles de l’IoT peuvent être importantes, avec la création de nouveaux métiers et de nouvelles compétences ; mais aussi sources de tensions.
Un des risques importants est lié à la séparation des tâches. Est-ce que l’entreprise va se penser comme une entreprise à deux vitesses ? D’un côté, une équipe de type “nouveau produit IoT”, avec des jeunes geeks. De l’autre côté, les “anciens” qui n’auraient plus le droit de penser le nouveau monde connecté et digital, à qui serait laissé le développement de leurs produits et qu’il s’agirait de pousser à la retraite...
C’est un risque induit par tous ces développements qui vont être humainement compliqués à mettre en place. Ce phénomène d’entreprises à deux vitesses apparaît déjà dans des entreprises pour lesquelles le cycle de vie de développement des produits, connectés ou non, est de 20 ans, 30 ans voire 40 ans. Encore faut-il pouvoir garder les anciens produits pour les maintenir pendant quelques décennies, tout en développant les futures technologies et futurs produits…
J’ai récemment échangé avec un certain nombre d’équipementiers automobiles qui produisent des axes de direction et des volants. Avec les objets roulants connectés, le volant automobile disparaît... Que doivent devenir ceux qui produisent ces technologies anciennes ? Un jour ou l’autre, elles ne seront plus nécessaires ! L’entreprise doit aussi se penser en se disant que des produits anciens vont devenir obsolètes, et que de nouveaux produits vont les remplacer petit à petit. Elle doit aussi se demander comment gérer cette organisation à deux vitesses.
N’existe-t-il pas une possibilité d’enrichissement mutuel pour développer de la créativité, des nouvelles solutions et de nouvelles approches ?