Nous allons examiner de plus près un dispositif ouvert à tous, mais parfois compliqué à appréhender : le compte personnel de formation.
De quoi s'agit-il exactement ? Pour quel usage est-ce que je peux m'en servir ? Comment est-ce que ça fonctionne ?
Qu'est-ce que le CPF ?
Le compte personnel de formation (CPF) est en réalité le fruit de plusieurs années d'évolution et de réformes. Le principe du "droit à la formation" reste la ligne directrice. Mais définir un système simple et efficace à la fois pour les salariés, les demandeurs d'emploi et les employeurs est compliqué !
Le DIF ou droit individuel à la formation (2004)
L'ancêtre du CPF s'appelait le DIF ou droit individuel à la formation. Ce dispositif était destiné uniquement aux salariés des secteurs publics et privés et leur permettait de bénéficier d'un droit à la formation de 24 heures par an pendant 5 ans, puis de 12 heures par an cumulables dans la limite de 150 heures.
Création du CPF ou compte personnel de formation (2015)
Le 1er janvier 2015 est créé le CPF afin d'améliorer le droit à la formation des individus. L'objectif est de faciliter l'accès à la formation tout au long de la carrière et de rendre l'individu plus acteur de sa formation.
Les principales modifications sont :
la création d'un compte qui va accompagner la personne tout au long de sa carrière, de son entrée dans la vie professionnelle jusqu’à son départ à la retraite ;
ce système facilite donc la "portabilité" des droits lorsque la personne change d'employeur ;
l'élargissement des bénéficiaires : sont concernés les salariés, mais aussi les demandeurs d’emploi ;
l'individu peut décider de suivre une formation sans demander l'accord de son employeur, si celle-ci se déroule en dehors des heures de travail ;
la gestion des comptes est confiée à la Caisse des dépôts et consignations ;
le CPF propose uniquement l'accès à des formations certifiantes ou diplômantes.
La restriction aux formations certifiantes et diplômantes a aussi limité l'accès à la formation pour de nombreux salariés contraints de négocier des autorisations d'absence avec leur employeur.
Enfin, les formalités administratives restent complexes et découragent un grand nombre de candidats à la formation via leur CPF.
La réforme du CPF (2019)
La loi "Avenir professionnel" va donc réformer et améliorer le CPF, avec la volonté de renforcer la liberté des individus dans le choix de leur formation.
De nouveaux changements sont donc apportés :
Le changement principal est la monétarisation du CPF. Le CPF est crédité en euros et non plus en heures.
Le compte personnel de formation (CPF) s’adresse désormais à tous les actifs, à partir de 16 ans et jusqu'à leur départ à la retraite.
Les formations éligibles sont redéfinies et permettent donc d'élargir les possibilités.
Le CPF « de transition », un nouveau dispositif que nous détaillerons, vient remplacer le CIF (congé individuel de formation).
Le CPF intègre le site moncompteactivite.com.fr et permet de gérer son parcours professionnel, préparer son projet d'évolution et gérer ses droits à la formation.
Un financement élargi et plus souple
Philippe Debruyne, secrétaire confédéral à la CFDT et président de la commission évaluation à France compétences a participé à la réflexion menant à la loi “Avenir professionnel”. Il nous présente les principaux changements et les logiques qui les ont provoqués.
Le CPF est principalement financé par la contribution formation des entreprises. Après avoir payé la dotation annuelle au financement de la formation des demandeurs d'emploi, France compétences reverse 10 à 20 % des fonds à la Caisse des dépôts et consignations au bénéfice du CPF.
La loi fixe désormais de nombreuses possibilités d'abondement afin d'augmenter ce budget. Le co-financement va donc être un axe important, faisant intervenir des négociations au sein des entreprises mais aussi de Pôle Emploi ou dans les différentes structures régionales ou professionnelles.
Enfin, le titulaire du CPF pourra lui-même prendre à sa charge une partie du financement de sa formation si cela s'avère nécessaire.
3 catégories d'abondements par les employeurs
Trois abondements supplémentaires sont définis pour les employeurs :
un abondement en application d’un accord collectif d’entreprise ou de groupe ou, à défaut, de branche, prévoyant des dispositions plus favorables que la loi afin d'alimenter le CPF de ses salariés ou de certaines catégories de salariés ;
un abondement « correctif » de 3000 € dans le cadre de l’entretien d’évolution professionnelle, pour tout salarié n’ayant pas bénéficié à l’issue de 6 ans d’ancienneté de ses entretiens professionnels et d’au moins une formation non obligatoire ;
un abondement d'un montant minimum de 3000 € pour tout salarié licencié à la suite du refus d’une modification de son contrat de travail résultant de l’application d’un accord de performance collective.
Les autres sources d'abondements
Très souvent, ces abondements sont destinés à certaines catégories de salariés fragilisés face à l'emploi :
des personnes engagées dans une démarche de création ou de reprise d’entreprise ;
des personnes ayant un bas niveau de qualification ;
des salariés dont l’emploi est menacé ;
des travailleurs précaires (CDD, intérim…) ;
des travailleurs âgés d’au moins 45 ans ;
des personnes reprenant le travail après une longue période d'arrêt.
Ces autres abondements peuvent être effectués par les différents organismes impliqués dans la formation et le maintien de l'emploi. Il peut donc s'agir, par exemple, des régions, d'un OPCO, de chambres régionales des métiers et de l’artisanat...
Concernant les demandeurs d'emploi, Pôle Emploi ou l'Agefiph peuvent aussi décider de financer des abondements au CPF pour certaines catégories de demandeurs d'emplois, ou afin de promouvoir l'accès à certains emplois en pénurie de candidats.
Les non-salariés ont eux aussi accès au dispositif du CPF. En plus de leur abondement lié à leur période en tant que salarié s'ils l'ont été, ils peuvent en plus bénéficier d'un abondement via le FAF (Fonds d'assurance formation) pour lequel ils cotisent.
Le CPF de transition
Le CPF de transition est un dispositif qui permet de financer le "Projet de transition professionnelle".
La disparition du congé individuel de formation
La création de ce nouveau dispositif a entraîné la disparition du CIF ou congé individuel de formation. Le CIF est probablement le dispositif qui a eu la durée de vie la plus longue de l'histoire de la formation professionnelle en France !
Il est apparu pour la première fois dans la loi du 3 décembre 1966 qui définissait un droit d'absence pour suivre une formation. Le CIF s'est réellement développé à partir de 1982 lors de la création des FONGECIF habilités à gérer les contributions obligatoires versées par les employeurs.
Le financement du projet de transition professionnelle
Après avoir payé la dotation annuelle au financement de la formation des demandeurs d'emploi, France compétences reverse chaque année une allocation spécifique de 5 à 10 % des fonds au dispositif de CPF de transition. Il s'agit donc d'une contribution différente de celle du CPF. Les fonds sont transférés aux commissions paritaires interprofessionnelles régionales (CPIR).
Les conditions d'accès
Pour bénéficier d’un congé de transition professionnelle, le salarié doit justifier d’une ancienneté d’au moins vingt-quatre mois, consécutifs ou non, dont douze mois dans l’entreprise. L’ancienneté s’apprécie à la date de départ en formation du salarié.
Ces conditions sont plus souples pour les salariés terminant un CDD et ne sont pas exigées pour les salariés reconnus en situation de handicap et pour certaines catégories de salariés licenciés. La durée de ce congé est alignée sur celle de la formation.
La mise en œuvre du CPF de transition
Tout comme le CIF, le salarié doit faire une demande écrite d'autorisation d'absence auprès de son employeur, en respectant un délai de :
120 jours avant le début de l’action de formation pour une absence à temps plein de plus de 6 mois ;
60 jours avant le début de l’action de formation pour une absence à temps plein de moins de 6 mois ou à temps partiel.
Le dossier complété par le centre de formation, l'entreprise et le salarié est ensuite communiqué au CPIR et passe en commission. Des critères de sélection sont définis par les CPIR, tels que le réalisme du projet, le niveau d'études du bénéficiaire ou le montant du budget requis.
La prise en charge des coûts
Si le dossier est accepté, le salarié bénéficie d'une prise en charge totale ou partielle de sa rémunération par le CPIR. De même, le CPIR fixe un niveau de prise en charge des frais de formation. Si nécessaire, le salarié peut alors demander au CPIR ou à son employeur de bénéficier d'un abondement.
Le CPIR fixe un niveau de prise en charge de sa rémunération en fonction d'une grille déterminée par Décret.
Salaire de référence (SR) | Formation courte (inférieure ou égale à un an ou 1200 h) | Formation longue (supérieure à un an ou 1200 h) |
Inférieur à deux fois le SMIC | 100 % du SR | 100 % du SR au-delà d'un an |
Supérieur ou égal à deux fois le SMIC | 90 % du SR. Plancher : deux fois le SMIC. | 60 % du SR au-delà d'un an. Plancher : deux fois le SMIC |
En résumé
Le CPF a pour ancêtres le DIF et le premier CPF créé en 2015.
Il permet à chacun de bénéficier d'un financement pour se former tout au long de sa carrière.
Les fonds du CPF proviennent des contributions formation des entreprises, mais aussi des abondements versés par l'employeur ou par des organismes partenaires.
Le CPF de transition remplace le CIF. Il permet à tout salarié souhaitant changer d'orientation professionnelle de financer une formation certifiante et éligible au CPF.
Maintenant que vous en savez plus sur le CPF, suivez-moi dans le prochain chapitre pour découvrir comment acquérir des droits CPF.