Le modèle ADDIE contient une première phase, consacrée à l’analyse, c’est-à-dire à la définition du besoin.
Le terme « besoin » appartient au langage courant. Cependant, son sens va être différent pour le chef de projet pédagogique. La définition courante du besoin est :
“L'exigence née d’un sentiment de manque”, selon le dictionnaire Larousse.
Sur la base de cette définition, on pourrait formuler une foule de besoins.
Par exemple : « Les nouveaux membres de mon équipe doivent être formés à la communication» serait un besoin.
Vous avez sûrement remarqué que j’ai utilisé le conditionnel. En effet, au sens de l’ingénierie, la phrase précédente n’est pas un besoin, mais une demande.
Le chef de projet pédagogique ne va pas évacuer cette demande. Il va l’écouter, mais va devoir la questionner, la retravailler. Pour commencer ce travail de transformation, nous allons d’abord utiliser une définition plus précise et plus spécialisée :
Le besoin en compétences est un “écart entre les compétences nécessaires pour exercer un travail et les compétences réelles d'un individu à un moment donné.”
Quand vous lisez cette définition, vous pouvez remarquer des points importants. Le premier, c’est qu’il faut qu’il y ait écart ; le deuxième, c’est que cet écart concerne les compétences. Enfin, le troisième, c’est qu’on est centré à la fois dans le temps (“un moment donné”) et sur une personne (“un individu”).
Revenons sur cette notion d’écart :
Définir un écart est très important à deux titres. D’abord, parce que quand on définit un écart, on définit en fait le niveau actuel et le niveau espéré. On doit pouvoir expliquer la différence entre les deux. Le niveau actuel peut ne pas être jugé satisfaisant (existence de dysfonctionnements, de difficultés). On peut également considérer que le niveau actuel est satisfaisant, mais qu’il est possible d’aller plus loin à l’avenir, ou encore qu’un “nouveau niveau” sera nécessaire.
C’est par exemple le cas quand on utilise un nouvel outil dans le travail. Dans certains cas de figure, il peut arriver à ce moment-là que le chef de projet et/ou le demandeur se rendent compte que l’écart n’est pas significatif… et qu’il n’y a donc pas vraiment de besoin.
La deuxième raison qui fait l’importance de définir cet écart, c’est que cela permet déjà d’envisager l’importance du dispositif à mettre en œuvre. À faible écart, petit dispositif, à grand écart, dispositif important. Même dans les situations où le chef de projet et le demandeur n’ont pas la possibilité de quantifier cet écart, vous pouvez en général distinguer trois cas :
écart non significatif,
écart significatif,
écart insurmontable.
Le premier signifie que l’écart de compétence ne porte pas à conséquence. Il est donc possible de répondre au besoin de compétences, mais cela ne nécessite pas de mettre en place un projet. Dans ce type de cas, on préférera mobiliser un catalogue de formation ou une action informelle.
L’écart significatif est le cas typique où mobiliser un projet d’ingénierie : si rien n’est fait, cela aura des conséquences sur l’activité des individus.
L’écart insurmontable, enfin, est un cas de figure heureusement rare, mais qui signifie que le besoin de compétence ne peut être comblé dans un délai convenable. Quand cela arrive, c’est notamment parce que les individus n’ont pas eu l’occasion de se former depuis longtemps. Chez OpenClassrooms, nous faisons en sorte que vous ne soyez jamais dans ce cas de l’écart insurmontable en vous encourageant à apprendre souvent. :)
De manière pratique, définir l’écart de niveau c’est en fait définir le résultat opérationnel une fois la formation terminée.
On obtient alors des expressions plus précises.
Par exemple :
Dans les trois mois qui suivent leur arrivée, les salariés devraient être en mesure d’utiliser les vecteurs de communication adaptés.
Il faudrait que mon équipe atteigne un taux de conversion de 40% sur les rendez-vous commerciaux au lieu de 20% aujourd’hui.
Ces expressions sont très différentes du premier exemple (sur la communication) :
elles se basent sur les activités réelles des individus ;
elles définissent le niveau à atteindre.
Ça fonctionne ! Grâce à ce type de phrases contenant un résultat, le chef de projet pédagogique passe d’une demande à ce qui commence à ressembler à une expression de besoin. En définissant le résultat et son niveau, vous avez défini l’objectif ou les objectifs de formation.
Dans ce chapitre, vous avez donc appris à définir un objectif en réponse à un besoin de compétences, ceci à partir d'une demande.
Il reste néanmoins du travail pour obtenir un besoin de formation complètement défini : le premier travail est de passer d’un besoin de compétences à un besoin de formation ; le deuxième est de qualifier le besoin en prenant en compte les contraintes.
Ça se passe dans le chapitre suivant !